Les jardins alpins et de rocaille

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Les jardins alpins et de rocaille
Photo : Société de plantes alpines et de rocaille du Québec.
Par Charles Charron, Société de plantes alpines et de rocaille du Québec (SPARQ).

La plupart des jardiniers en viennent à construire des jardins de rocaille après avoir goûté aux beautés des grandes plates-bandes de vivaces en aménagements dit traditionnels.

Comparons maintenant la disposition de grandes plantes en plates-bandes avec la disposition de petites plantes provenant des sommets de haute montagne disposées dans des rocailles. Le jardin de rocaille diffère de ces grands aménagements à bien des égards et la conception doit donc y être envisagée différemment.

Remarquez que nous ne disons pas que la conception des plates-bandes devrait être de moindre importance, au contraire, elles présentent une grande valeur dans les aménagements de nos parcs et jardins.

Ces plates-bandes ne sont généralement composées que de grandes plantes sur un sol presque toujours plat et riche. Ces aménagements profitent bien aux grands espaces linéaires ou circulaires. Ils contiennent donc de grands groupes de plantes, massées les unes contre les autres, généralement côte à côte, sans espace libre entre elles.

Par contre, les jardins de rocaille, eux, nécessitent un substrat composé de pierres, des petites et des grosses, du gravier, un sol sableux dans lesquels on disposera les alpines comme elles peuvent nous apparaître en montagne. La forme et la disposition spatiale des pierres et des rochers jouent un rôle des plus importants dans le jardin de rocaille : ce sont les éléments qui servent à reproduire l’espace naturel de la toundra ou des espaces alpins, avec de petites plantes individuelles massées ou séparées les unes des autres par des rochers ou du gravier, ou encore, intercalées avec d’autres types de plantes.

Ainsi, la coordination des couleurs peut être abandonnée. Pas d’arc-en-ciel d’un spectre de couleurs à un autre, les bleus froids se fondant progressivement dans les roses, rouges et oranges chauds.

Nous chercherons plutôt à reproduire une peinture par éclaboussures, les points jaunes des drabas, les bleus lavande des érigérons et le blanc brillant des ibéris, toutes ces nuances comme les petits points des néo-impressionnistes.

La quantité de plantes selon chaque variété utilisée influencera bien sûr le tableau floral. En général, vous pouvez, comme en nature, utiliser au moins trois de chaque variété, mais si vous faites des semis et si vous cultivez vos propres plantes, vous pourrez peut-être en utiliser beaucoup plus.

On peut aussi choisir des plantes dont la couleur des fleurs et la période de floraison sont concordantes afin de réutiliser ces teintes et ces formes plus loin dans le jardin de rocaille. On pense alors au blanc et au jaune des drabas de différentes espèces qui sont un choix évident, tout comme le rose et le blanc des androsaces, ainsi que le rose de l’aéthionème à grandes fleurs en sont un autre.

Le jardinier sophistiqué qui dispose d’une large palette de couleurs peut, entre autres, introduire des plantes à feuillage panaché à la lisière ombragée du jardin pour faire ressortir le jaune pâle de la primevère auricule plantée plus loin sur la pente, un phlox étalé presque bleu, un thym lilas rosé et une lavande naine peuvent être rendus particulièrement éclatants par l’ajout d’une giroflée orange.

Les jardins alpins et de rocaille
Photo : Société de plantes alpines et de rocaille du Québec.

Lors de la construction de sa rocaille, chaque jardinier y va de sa propre capacité à manier ses choix de formes et de couleurs : il n’y a pas de règles rigides. Parfois, on met en terre un joyeux mélange et on laisse les plantes présenter leurs propres surprises. Plus tard, des accents peuvent être ajoutés, mais le jardinier de rocaille fait généralement moins de nouvelles transplantations pour réaliser sa composition. En effet, les plantes alpines sont, pour la plupart, réticentes aux déplacements, alors pourquoi prendre le risque? Il vaut mieux ajouter que soustraire, compte tenu du risque lié à la transplantation.

Les variétés de formes et de couleurs sont fournies par un grand choix de plantes qu’il est possible d’obtenir grâce aux échanges entre jardiniers passionnés et aussi avec nos propres semis et boutures.

La surprise est fournie en construisant le jardin de sorte qu’il puisse être vu d’un seul endroit à un moment donné selon un parcours qui permettrait d’apprécier les plantes aux moments de la floraison propre à chaque espèce; comme dans les jardins japonais, les allées doivent conduire à de nouveaux points de vue et donc à de nouvelles découvertes.

Parce que la rocaille est généralement élevée verticalement, différentes expositions au soleil et aux intempéries sont créées, avançant ou retardant la saison de floraison des mêmes plantes plantées dans des lieux différents.

Lors de la conception de rocailles, on devrait rechercher des plantes à feuillage et à texture particulières qui sont également persistantes. Les contrastes sont recherchés pour accroître l’intérêt du jardin, surtout, lorsque la plupart des plantes n’ont presque plus de fleurs à l’automne Par exemple, on peut faire les associations suivantes : feuillage gris à côté du vert foncé, feuillage à plumes à côté des lourdes feuilles coriaces ainsi que d’autres combinaisons qui ajouteront une touche à la nature captivante du jardin.

Parfois une plante de même espèce que celles qui l’entourent se démarque par sa floraison ou son feuillage et crée ainsi un petit effet d’importance. Les surprises sont toujours les bienvenues.

Une plante à l’allure glorieuse doit être mise en valeur sur un rocher ou sur un fond de plantes moins spectaculaires voire non florifères telles que les petites graminées, afin que sa beauté individuelle de couleur ou de forme plus impactante puisse être admirée.

Ne jamais oublier que la construction d’une rocaille ne doit pas chercher à introduire le maximum de plantes, mais plutôt à établir une saine relation entre le vivant et le minéral. Voilà quelques conseils de la part de jardiniers passionnés.

Le premier des trois articles sur les jardins alpins a été publié dans l’édition de mai 2022 de l’Hortiquoi, aux pages 12 et 13, disponible en format PDF.
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